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L’histoire du pays est autrement plus compliquée qu’on ne le croit

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Le Canada, c'est complexe

Le Canada, c'est complexe

Photo : Le Gaboteur (2017)

Amorcée au Labrador le 3 septembre, la tournée nationale du spectacle Le Canada, c’est complexe était de passage à Moose Jaw le 21 octobre et à Saskatoon le 24 octobre. Cette comédie satirique bilingue, créée sous la direction de la Terre-Neuvienne Mary Walsh, propose un regard à la fois tendre et cinglant sur l’histoire du pays. Rires et réflexions à l’horizon. 

Quiconque connait le parcours artistique de Mary Walsh est en mesure de prédire que sa plus récente mouture est loin d’être une lecture idyllique de l’histoire du Canada. « On nous a appris que ce pays avait été découvert par Jean Cabot et Jacques Cartier. C’est fondamentalement un gros mensonge ! C’est dur de découvrir un pays quand des gens y vivent déjà », a-t-elle lancé d’entrée de jeu lors d’une rencontre avec Le Gaboteur dans la salle de répétition du spectacle en aout dernier. 

Pour écrire cette comédie satirique, la Terre-Neuvienne a réuni une équipe de scripteurs d’expérience de plusieurs régions du pays. Ensemble, ils ont d’abord réfléchi aux évènements souvent occultés par le discours officiel, qui ont façonné ce qu’est aujourd’hui le Canada. Leur objectif : faire rire, évidemment, mais également faire réfléchir et, éventuellement, agir.

Une tournée canadienne faisant des arrêts dans toutes les provinces et dans les territoires ainsi que dans plusieurs communautés autochtones pose aussi de grands défis au plan linguistique. Le spectacle aura toujours des parties en anglais et en français, mais elles seront à proportion variable selon les lieux de représentation. Les mots de bienvenue de cette tournée qui fera des arrêts dans plusieurs communautés autochtones et inuit sont de plus livrés dans la langue des spectateurs. 

Une histoire à découvrir

« À première vue, l’histoire du Canada est assez ennuyante. Mais c’est parce que nous ne la connaissons pas vraiment. Or, notre histoire est tout sauf ennuyante. Plusieurs évènements dramatiques se sont produits ici depuis des siècles et dans un passé plus récent », rappelle-t-elle.  

« Nous avons volé les terres des Premières Nations et des Inuit, nous avons imposé une taxe d’entrée aux Chinois, nous avons emprisonné des milliers de Japonais pendant la Deuxième Guerre mondiale », donne-t-elle en exemple. Autre mensonge que l’équipe de concepteurs entend déboulonner. « Le Canada, pays bilingue ? En réalité, seulement 18 % de la population parle les deux langues officielles et ces gens vivent, en majorité, au Québec », a-t-elle souligné. 

« Nos façons de faire ne sont pas toujours brillantes, mais nous sommes bons aussi. Le Canada n’a jamais eu un mythe qui réunit l’ensemble de sa population, comme c’est le cas pour les États-Unis avec l’American Dream. Mais c’est peut-être mieux ainsi. Cela nous rend meilleurs, plus ouverts », enchaine-t-elle. 

Le francophone de service

Thomas Duret est le francophone « officiel » de l’équipe d’interprètes du spectacle Le Canada, c’est complexe. Au contact de ses collègues interprètes et autres artisans de ce spectacle, il confie avoir appris beaucoup sur le Canada et sur sa francophonie. 

Même s’il est né en France, le Québec est sa terre depuis 25 ans. Au sein de l’équipe d’interprètes, il a hérité de la lourde tâche d’être un peu ambassadeur de la francophonie de toutes les provinces et d’initier ses collègues à la prononciation des passages en français.

« C’est terrible jusqu’à quel point l’histoire qu’on nous apprend à l’école est loin de la réalité. Par exemple, j’ai appris l’existence de francophones au Manitoba quand j’avais 22 ans ! En travaillant sur ce spectacle, je m’ouvre à la culture canadienne et à la vraie histoire du pays », résume-t-il.

Plusieurs membres de l’équipe du spectacle sont d’origine autochtone ou métisse, dont l’un des directeurs musicaux, Grey Gritt, un Métis francophone originaire de la région de Sudbury. « À leur contact, j’apprends à voir les choses avec un autre point de vue que celui du francophone blanc. Je comprends mieux l’ampleur du colonialisme dont sont encore victimes les Premières Nations et les Inuit », dit-il aussi.  

À entendre M. Duret, il est clair que cette comédie fera réfléchir. Mais attention, elle fera rire aussi. « Il y a beaucoup de chansons drôles dans le spectacle. On y verra aussi un jeu-questionnaire hilarant », raconte-t-il.

Humour canadien ?

Mary Walsh a également réfléchi sur l’existence, ou non, d’un humour qui transcende les provinces et territoires du pays. Son constat : ce qui unit tous les Canadiens, ce sont les farces politiques sur Ottawa. Au-delà de ce point commun, l’humour politique est essentiellement provincial et même régional.

« À Terre-Neuve et au Labrador, il n’y a rien de doux dans l’humour. C’est rude, comme notre territoire. Ailleurs, sans doute aussi à cause de la géographie, la comédie est plus douce », avance-t-elle. Le pari d’un spectacle « canadien » est donc, dans ce contexte, risqué, reconnait-elle.