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« La situation des aînés, c’est un scandale de notre société! »

Entretien avec la Directrice de la Fédération des aînés fransaskois

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5 à 7 de la Fédération des aînés fransaskois à Saskatoon

5 à 7 de la Fédération des aînés fransaskois à Saskatoon

Agathe Gaulin (2e en partant de la gauche) en pleine discussion avec des membres de la FAF.
Photo: Alexandra Drame
À l’occasion du 5 à 7 organisé par la Fédération des aînés fransaskois (FAF) à Saskaoon, Agathe Gaulin, la directrice de cette association qui œuvre depuis plus de 30 ans au service des seniors, a accordé une entrevue à l’Eau vive. Elle y présente les projets à venir et n’hésite pas à dénoncer les conditions de vie de nos aînés. Une génération trop souvent laissée de côté…

L’Eau vive - Comment va la FAF en ce moment?

Agathe Gaulin - Nous rencontrons certains défis pour avoir des bénévoles: les retraités sont souvent disponibles en octobre/novembre, puis à la fin de l’hiver vers mars/avril car en début d’année, ils partent dans le Sud, et puis ils souhaitent passer les autres congés scolaires en famille. Nous avons aussi beaucoup de personnes en milieu rural qui sont occupées en période de semences ou d’élevage. C’est aussi parfois difficile pour les aînés de se déplacer en hiver, ou en soirée. Nous avons des défis pour réunir les gens pour des gros rassemblements, par contre ils sont très actifs dans les communautés. Ils se rencontrent de plus en plus entre eux, entre amis. C’est bien, c’est un indice que le réseau associatif a fait beaucoup de travail dans les communautés. Ils s’appuient, s’entraident... C’est difficile d’organiser des activités car des besoins sont exprimés mais les gens ne viennent pas, ou bien trouvent les services du côté anglophone. Il y a aussi de plus en plus de couples mixtes, alors il faut faire des activités bilingues. 

EV -Qui sont vos membres?

AG - Il y a actuellement 7 clubs d’aînés, ou clubs d’âge d’or, membres de la FAF à travers la province. On les prend à tort pour des clubs de jeux de cartes, mais ils font beaucoup plus que cela! Les membres s’aident beaucoup les uns les autres, peuvent aider au transport de malades chez le médecin ou à l’hôpital, emmener de la nourriture à quelqu’un qui ne peut pas se déplacer, apporter du soutien en période de deuil. Tout cela se fait de façon informelle, les gens ne s’en vantent pas forcément mais c’est très courant. Le comité de bien-être communautaire et le Réseau en santé en français font beaucoup de travail avec les clubs d’âge d’or pour lutter contre l’isolement des aînés sans famille.

EV -Quels sont les projets à venir?
AG - Deux projets seront lancés aujourd’hui : l’équipe fransaskoise 55+ et Histoires fransaskoises sur scène.

Nous travaillons à garder les aînés actifs physiquement, on les encourage à participer aux SK Seniors Games, afin qu’il y ait plus de francophones. On a aussi obtenu une subvention du Gouvernement du Québec pour une mission exploratoire afin de voir si on peut participer aux Jeux du Québec. Ce n’est pas juste du sport ou de l’athlétisme, il y a des sports pour l’esprit et la mémoire aussi. C’est l’occasion de se déplacer, s’amuser en français et pourquoi pas, compétitionner! On monte une équipe de Fransaskois de 55 ans et plus pour nous représenter. Si vous êtes cycliste, nageur, joueur de bridge, de bowling ou de tennis, faîtes-vous connaître!

Le 2e projet a été demandé par les aînés pour mieux documenter l’histoire de la fransaskoisie. On perd des aînés tous les mois, il faut continuer à recueillir les histoires de nos membres, maintenir la mémoire. Nous avons reçu des fonds pour un projet de 3 ans. La première année, nous allons réaliser des entrevues avec des Fransaskois. Cela peut être les gens qui racontent eux-mêmes une histoire, ou bien leurs enfants, ou quelqu’un qui les connaît. Nous recherchons des anecdotes, des histoires drôles ou émouvantes, un peu de tout. La deuxième année, la dramaturge Madeleine Blais-Dahlem va prendre des éléments, des personnages, et va en faire une pièce de théâtre. La troisième année, la pièce sera jouée dans cinq communautés. On encourage les gens de tout âge à venir nous conter leur histoire. Ce n’est pas de l’histoire ou de la généalogie que l’on veut faire, on veut les histoires fascinantes d’une mère ou d’une grand-mère, des histoires de la vie de tous les jours pendant les cinquante dernières années.

EV - Il y a récemment eu un cas de négligence dénoncé dans les médias. Quelle est la situation de nos aînés fransaskois? (NDLR - Margaret Warholm, 74 ans, pensionnaire anglophone d’une résidence pour personnes âgées à Regina, est décédée 3 jours après son admission à l’hôpital. Elle souffrait de malnutrition sévère, de fractures de la colonne vertébrale et de plaies de lit au dos si graves que des infirmières avec 20 ans d’expérience n’en avaient jamais vu de telles.)

AG - Beaucoup de personnes viennent des communautés rurales et doivent venir s’installer en ville car il n’y a pas de soin en milieu rural. Elles peuvent connaître de gros problèmes de communication: des études ont prouvé que l’on perd sa langue seconde avec l’âge quand on a une perte de capacités intellectuelles. C’est une situation complexe qui peut entraîner des difficultés à exprimer sa douleur à sa famille ou au personnel.

La pénurie de main d’œuvre dans les centres pour seniors c’est un problème de société, car ce sont des emplois peu valorisés. C’est mal payé, on ne demande que 6 mois de formation, on y retrouve souvent du personnel immigrant avec des qualifications dans d’autres domaines. C’est un scandale de notre société que nos aînés et nos petits soient mis entre les mains de gens peu qualifiés, ou dont ce n’est pas le premier choix de carrière. Il faudrait demander plus de diplômes et mieux payer les préposés.

Aux deux extrémités de la vie, c’est important que les enfants et les seniors soient soignés et stimulés.  On ne fait pas ça avec les bébés, alors pourquoi met-on nos aînés dans des lits et les drogue-t-on pour qu’ils soient dociles et ne parlent pas? On s’attend à ce que dans une garderie, le niveau de soins soit égal à celui d’une maman avec son enfant; et bien dans les maisons de retraite, on s’attend à ce que les soins soient du même niveau qu’à l’hôpital et que les aliments soient comparables à ce qu’on servirait à la maison. 

EV -Que fait la FAF pour y remédier?

AG - La FAF n’est pas politisée et ne fait donc pas de revendications directes, mais par l’intermédiaire du Saskatchewan Seniors Mechanisms dont nous sommes membres, nous défendons le dossier des logements des aînés et le maintien de leur niveau financier par exemple.

EV -Le mot de la fin?

AG - Il y a peu, on se préoccupait qu’il n’y ait plus besoin de la FAF. Quand on regarde de près l’étendue des projets avec la génération des baby-boomers qui prennent leur retraite, on se rend compte qu’il y a encore des besoins. Contactez-nous pour dire ce dont vous avez besoin et on fera ce qu’on peut. Comme nous l’avons toujours fait.

Pour communiquer avec la FAF : 306-653-7442