Un Plan d’action de bon augure
Dévoilement du Plan d’action pour les langues officielles, le 28 mars 2018 à Ottawa
Le président de l’Assemblée communautaire fransaskoise, Roger Gauthier (à droite), en compagnie de la ministre du Patrimoine, Mélanie Joly, et du député d’Edmonton Centre, Randy Boissonnault
Photo : Dominique Sarny / ACF
Le Plan d’action pour les langues officielles a été finalement dévoilé le 28 mars à Ottawa. Avec 2,7 milliards de dollars prévus pour 2018-2023, il constitue le plus gros investissement de l’histoire pour les langues officielles. La grande majorité des organismes communautaires francophones ont applaudi le Plan, et ont loué son approche du « par et pour ». Mais certains observateurs restent prudents, dans l’attente de détails sur sa mise en œuvre.
Au-delà de la grosse enveloppe, c’est l’approche du « par et pour » que les organismes célèbrent. « Le gouvernement a bien écouté les demandes de la communauté », estime Martin Théberge, président de la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF). Le responsable souhaiterait même aller plus loin avec un « par, pour et avec », réclamant ici une « réelle collaboration » avec le gouvernement. « C’est en travaillant ensemble qu’on obtiendra le meilleur impact de ces investissements », précise-t-il.
Jean Johnson était à Ottawa lors de l’annonce et s’est même entretenu en comité restreint avec le premier ministre et la ministre du Patrimoine canadien avant le dévoilement. « J’ai adoré le ton des discours », commente-t-il. Le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) est lui aussi enchanté par l’approche : « Il y a un désir de changer la culture au sein de l’appareil gouvernemental. Le ‘par et pour’ reflète le besoin des communautés de se prendre en main ».
Pour Linda Cardinal, professeure de sciences politiques à l’Université d’Ottawa, le gouvernement a démontré qu’il prenait toute la mesure de ses obligations. Elle se réjouit de ce que les langues officielles soient enfin reconnues « comme une source de fierté, de richesse et d’identité, plutôt que dans une logique économique comme avant ».
Malgré tout, la titulaire de la Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques met un bémol à la notion de « par et pour » : « C’est une version très édulcorée dans la réalité. Il y a eu certes un travail de consultation et de collaboration, mais ce que les communautés veulent, c’est avoir le contrôle des orientations. Ce n’est pas la même chose. Le principe de subsidiarité n’est pas dans le plan ».
Un investissement direct
Les organismes communautaires ont été entendus : les investissements se feront directement, sans passer par des transferts provinciaux. Aussi, tous les organismes soutenus présentement par Patrimoine canadien recevront une bonification de leurs financements, et ce dès le 1er avril. « C’était nécessaire. Ça faisait dix ans que les enveloppes n’avaient pas bougé alors que tout est à la hausse », relève Martin Théberge.
Dans le secteur culturel, plus de 11 millions de dollars seront investis. « Le gouvernement a reconnu le secteur des arts, cultures et industries culturelles comme étant l’un des vecteurs du développement de nos communautés », se félicite le président de la FCCF.
Le Plan d’action renouvèlera par ailleurs l’entente multipartite avec le lancement du corridor touristique et patrimonial pancanadien, l’augmentation du financement de Radio-Canada et de nouveaux investissements pour des agences culturelles telles que le Conseil des arts, le Centre national des arts, l’Office national du film, et le Fonds des médias. « La culture joue un rôle primordial. C’est l’identité d’un peuple, et c’est aussi un vecteur d’intégration pour les nouveaux arrivants », exprime Martin Théberge.
Un plan d’investissement, pas d’action ?
Linda Cardinal n’est pas très inspirée par le Plan d’action qui, pour elle, s’apparente bien plus à un plan d’investissement : « Ça ressemble plus à un catalogue, une liste d’investissements, sans trop de détails. On le lit comme un budget », regrette-t-elle.
Pour la professeure, le plan manque de cohérence. « Je m’attendais à quelque chose de plus fort et de mieux coordonné. Il manque une vision, des orientations, des objectifs précis et mesurables », analyse l’experte. Elle reproche aussi l’absence d’actions concrètes et aimerait trouver « un plan d’action pour la fonction publique ».
Malgré tout, la plupart des parties prenantes sont emballées par le Plan d’action. Mais plusieurs restent prudentes : « La balle est dans notre cour. C’est à nous de bien agir et démontrer le bienfondé de ces investissements », insiste Jean Johnson. « C’est loin d’être la fin du travail », conclut Martin Théberge.
L’Assemblée communautaire fransaskoise accueille favorablement le Plan d’action. « Le gouvernement a bien entendu nos préoccupations et adresse plusieurs points importants avec ce plan » a déclaré son président, Roger Gauthier.
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