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Là où la terre rencontre le ciel (extrait)

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Quelque part dans le sud de la Saskatchewan, dans les années 1860...

Le soleil décida de se pointer le nez juste au moment où il entra en ville.  C’est malgré tout trempé jusqu’aux os qu'il aboutit à l’auberge de madame Wells, « The Grand Hotel ». Elle n’avait pas vraiment été loin dans l’imaginaire pour trouver ce nom, surtout que c’était loin d’être ni le plus grand et certainement pas le plus chic, mais il y avait ici deux choses que Wilbur appréciait grandement : de l’excellente bouffe, et des filles. Pour ce qui est du confort, il n’y avait pas grand-chose à Regina qui ne pouvait battre son lit de paille improvisé qui l’attendait dans sa cabane particulière des Badlands.

Ayant mis le cheval dans l’écurie et l’ayant dorloté un brin, il entra dans le saloon principal pour se retrouver nez à nez avec la patronne qui lui sourit de ce qui lui restait de dents.

- Eh bien, si c’est pas Wilbur, pour l’amour, t’as décidé de faire trempette dans la Wascana avant d’arriver. Tu ne fais plus confiance à mes bains bien chauds.

Un petit rire emplit la pièce. Une dizaine de clients mangeaient tranquillement tout en s’offrant une jasette avec les quelques filles présentes.

- Un bain bien chaud serait certainement le bienvenu madame Wells, avec un de vos bons ragoûts. Si vous pouviez me prêter quelques vêtements secs d’ici à ce que mes pauvres membres puissent reprendre vigueur, ça serait apprécié.

- Mais tu t’es trompé de bâtisse mon petit chéri, le magasin général c’est trois rues plus loin.  Les vêtements secs qu’on a ici ne sont pas tout à fait adaptés à ta carrure masculine à moins que tu n’aies pas d’objection à porter la robe.

Cette fois l’hilarité fut générale. Wilbur n’en fit pas de cas, il connaissait bien l’humour sarcastique et pointu de madame Wells.

- Je ne suis pas un expert comme vous, mais je crois que les sous-vêtements de vos protégées sont passablement similaires aux nôtres et qu’on n’y verra pas de différence.

- On ne se pointe pas dans une auberge en sous-vêtements mon petit gars, c’est réservé pour les chambres en haut. Allez viens, on va t’arranger ça dans la cuisine. Tu n’es pas pour aller me fichtre une rumeur qui peut se rendre jusqu'aux oreilles de monsieur le curé, il y en a déjà suffisamment, pas besoin d'en rajouter les rares fois où tu te pointes le nez.

Wilbur fut entraîné dans une pièce à part, légèrement en retrait du bâtiment principal. La cuisine était isolée par un mur de pierres et un large panneau de métal, question d’assurer une protection contre le feu qui, dans une auberge semblable, couvait presque 24 heures par jour. Dans le foyer s’alignaient des seaux d’eau chaude et de soupe, suspendus à de petites chaînes accrochées sur les crochets du haut du foyer. Il y avait trois fours, tous bien bourrés de bois et de charbon. Des gigots rôtissaient dans les entrailles du plus gros et des ragoûts mijotaient sur le dessus des deux autres. Il faisait bon dans la cuisine, c’était chaud et ça sentait le parfum de bœuf et d’herbes de prairie.

La jeune fille affectée à la soupe lui servit un bol d’orge avec des bouchées de bœuf agrémenté d’un pichet d’eau de pluie fraîche. Madame Wells arriva avec un vêtement d'une pièce qui ressemblait à un pyjama, bien masculin d’ailleurs, et le lança sur la table.

- Allez, enfile ça chéri, je pense bien que c’est au moins plus large que ta taille. Cathy, donne-lui un coup de main et flanque-moi ces guenilles trempées devant le foyer de la salle d’amis, que ça puisse sécher avant qu’il ne se décide d'aller au lit.


Extrait du roman en chantier “Là où la terre rencontre le ciel”