Quand on ouvre le Scott's Standard Stamp Catalogue à la section USA on y découvre une profusion de timbres de la Statue de la Liberté. En effet, j'en compte 59. On ne peut s'empêcher de penser à Gustave Eiffel, le créateur de la tour Eiffel, et en même temps au sculpteur Frédérique Auguste Bartholdi.
Un groupe de républicains de France, amoureux des Américains, réunis le 21 avril 1863 ou 6 jours après l'assassinat de Lincoln, voulait célébrer le centenaire de l'Indépendance des États-Unis. Édouard de Laboulaye, dans un discours enflammé, proposait que la France fasse cadeau d'une statue gigantesque aux Américains pour immortaliser l'amitié franco-américaine. Or Bartholdi était présent. Il avait en progrès une sculpture destinée à garder l'entrée au Canal de Suez. Bartholdi et la Laboulaye étant de grands amis, le sculpteur a facilement été persuadé de changer la destination d'une œuvre en progrès comparable au Colosse de Rhodes.
Les Français créaient la statue à leurs frais. Les Américains préparaient le site et créaient le piédestal à leurs frais. Bedloe Island dans le port de New York fut le choix. La statue de 46 mètres, la face tournée vers l'Europe, accueillera les millions d'émigrés à la recherche d'une liberté légendaire et de la richesse.
Bartholdi a créé dans ses ateliers de France la coquille de la statue, une coquille composée de 300 panneaux de 2 mètres par 3, façonnée de cuivre repoussé. De son côté, Eiffel dans ses propres ateliers construisait avec des poutres de fer une charpente de support pour la coquille plutôt fragile par rapport à sa grandeur.
La statue fut entièrement assemblée dans les chantiers de Gaget, Gauthier et compagnie à Paris. Une cérémonie pour rendre officiel de don de la France aux États-Unis eu lieu le 4 juillet, la journée où les Américains fêtent avec moult pétards leur indépendance.
Pour la transporter à New York, on a démoli la statue et on a empaqueté ses 350 pièces dans 210 caisses. Le trajet de Paris à Rouen fut par voie ferrée et par chaland de Rouen au port de mer où l'Isère l'attendait. L'Isère était une frégate naviguant à la vapeur ou à la voile. La traversée étant très houleuse, on dû prendre refuge aux Açores. Elle dura treize mois. L'entrée au port de New York fut accompagnée par plus de 90 navires de toutes espèces.
Tout grand projet ne provoque-t-il pas de la controverse? La Statue de la Liberté n'en était pas exempte. À l'inauguration, parmi les 600 invités d'honneur, les noirs brillaient par leur absence. Cette statue ne représentait-elle pas la liberté et l'émancipation des esclaves? Le Cleveland Gazette écrivait ceci: "Poussons la statue de Bartholdi, la torche et le reste, dans l'océan jusqu'à ce que la liberté dans ce pays soit telle qu'elle permette à un homme de couleur, industrieux et inoffensif, vivant dans le Sud, de gagner correctement sa vie et celle de sa famille, sans être ku-kuzisé (...). peut-être assassiné, sa femme et sa fille outragées, et sa propriété détruite. L'idée de la "liberté" de ce pays "illuminant le monde", ou même la Patagonie, est tout à fait ridicule".