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Le 7e art - chronique cinéma

Les enfants d’Abraham

Les enfants d’Abraham
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J’avais onze ou douze ans quand j’ai fait la connaissance d’un juif. Un rabbin. Mon père avait découvert, entre deux murs d’un logement qu’il rénovait, ce qui semblait être un rouleau biblique ancien.

À la suite de cette découverte, mon père a contacté une synagogue et un rabbin est venu chercher le rouleau.

Le rabbin a demandé à mon père combien il voulait pour le rouleau. Mon père lui a répondu qu’il ne voulait rien. Le rabbin fut surpris et ravi. Ils ont conversé un bon moment.

Par la suite, au gré des voyages et des études, j’ai connu beaucoup de personnes d’ascendance juive, pratiquantes ou non. J’ai habité dans un quartier hassidique d’Outremont. Certains jours de shabbat, je m’installais dans ma cour pour écouter, par les fenêtres ouvertes, les chants hassidim de mes voisins. C’était magnifique.

Pendant quelques années, j’ai été directrice en Centres de petite enfance. Ce qui m’a permis, entre autres, de connaître des parents musulmans venus du Maghreb, d’Afrique. Certains étaient pratiquants, d’autres non. J’ai accepté l’invitation d’une famille à faire le ramadan. 

Si je raconte ça, c’est pour dire l’incompréhension et la peine que j’éprouve devant la montée insensée de l’islamophobie et de l’antisémitisme, un antisémitisme virulent, que je croyais naïvement chose du passé.

Sur le mont des Oliviers

Quelques jours après les horribles massacres perpétrés à Gaza par le Hamas le 7 octobre dernier, j’étais à l’aéroport de Montréal avec mon fils et sa compagne. Elle était absolument bouleversée par ce qui se passait en Palestine, d’autant plus bouleversée qu’elle est allée à Jérusalem il y a dix ans.

« As-tu déjà entendu parler du syndrome de Stendhal ? Il survient lorsqu'une personne vit une forte expérience esthétique suscitée par une œuvre qui la rapproche tellement du sublime que l'émotion devient quasiment insoutenable. Eh bien moi, j'ai vécu ça sur le mont des Oliviers. »

« Je fais face aux stèles blanches où sont enterrés des Juifs. Je me retourne pour faire face au Dôme du Rocher (appelé parfois mosquée d’Omar). Au moment où les rayons du soleil traversent les nuages, les cloches chrétiennes du Saint-Sépulcre sonnent et l'appel à la prière musulmane est lancé. J’en ai le souffle coupé. »

« Ça marque profondément, être frappée de plein fouet par ces trois grandes religions réunies en un seul lieu. C’était tellement beau ! ».

Les enfants d’Abraham, réunis en un seul lieu. Qui explose depuis longtemps. Les enfants d’Abraham qui s’entretuent. Dans les deux camps, il y a des fanatiques. Dans les deux camps, on prend la population en otage. Dans les deux camps, l’objectif est d’anéantir l’Autre.

Paix, Shalom, Salam, ce n’est pas pour demain

De nombreux jeunes Palestiniens d’aujourd’hui qui voient les leurs tomber sous les bombes risquent de devenir les extrémistes de demain.

De nombreux jeunes Israéliens témoins des actions inhumaines du Hamas risquent de devenir les extrémistes de demain. Pour reprendre cette phrase de Gandhi, « œil pour œil, tout le monde finira aveugle ».

Le conflit déborde de l’Orient. En Occident, en Europe, chez nous, les deux camps s’affrontent. Parfois violemment. Des discours haineux et des coups de feu se font entendre dans nos rues, des amitiés se brisent, des familles éclatent. 

En décembre 1947, à la suite du vote de partage de la Palestine adopté par l’ONU, le représentant arabe, le Dr Khoury, avait déclaré : « Ainsi, vient de s'allumer un incendie qui risque d'entraîner le monde dans le plus sanglant des conflits. »

J’aimerais que l’Histoire lui donne tort. J’aimerais que les enfants d’Abraham mettent un terme à cette vieille et sanglante chicane de famille. J’aimerais, mais…

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