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Littérature: Quand l’Est et l’Ouest se rencontrent

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Crédit : Gülfer ERGIN / Unsplash

Le dernier numéro de la revue fransaskoise À ciel ouvert, publié en décembre dernier, fait la part belle au rapprochement littéraire Est-Ouest. Faisant le compte rendu détaillé d’une conférence tenue en mars 2021 sur le thème de « La vitalité créative et collaborative des communautés francophones », la revue souligne le climat dynamique de synergie qui se développe entre l’Est et l’Ouest ces derniers temps. Jeffrey Klassen, l’un des coordinateurs de cette conférence, linguiste et professeur à l’Université de la Saskatchewan, dévoile les coulisses de ce rapprochement.

« Cette belle symbiose Est-Ouest trouve ses origines il y a quatre ans lorsque l’ancien coordonnateur de la revue À ciel ouvert, Sébastien Rock, a pris un café avec l’éditeur de la revue acadienne Ancrages, Jean-Pierre Caissie, lors d’une visite à Saskatoon, explique le linguiste. Caissie visitait sa belle-famille fransaskoise avec sa conjointe, Rachel Duperreault, une Fransaskoise implantée en Acadie qui travaille en tant que coordonnatrice d’Ancrages. »

De cette rencontre fortuite résulte une collaboration entre les deux revues littéraires « d’une grande valeur sociale parce qu’elle unit deux communautés littéraires en contexte minoritaire », souligne Jeffrey Klassen.

La conférence de mars 2021, organisée par le Collectif d’études partenariales de la Fransaskoisie (CEPF), conviait plusieurs auteurs de l’Ouest et de l’Est canadiens, dont les Fransaskois Mychèle Fortin, David Baudemont, Thuy Nguyen, ou encore Michel Clément, à lire des textes et confronter leurs imaginaires.

Un lien à tisser

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Jeffrey Klassen est linguiste et instructeur à l’Université de la Saskatchewan où il donne des cours de grammaire, de sociolinguistique et d’acquisition. Diplômé de l’Université McGill, il est né au Manitoba au sein d’une famille mennonite adepte d’un dialecte allemand et a grandi à Edmonton et Ottawa. Il a appris le français en immersion et à l’université.

La relation entre l’Est et l’Ouest littéraires avait déjà démarré dans le numéro précédent de la revue À ciel ouvert publiée pendant l’hiver 2020-2021. Aussi, la première table ronde de la rencontre en mars 2021 avait impliqué tous ceux qui ont œuvré à cette collaboration. 

« Nous avons invité les co-éditeurs de ce numéro, Jean-Pierre Caissie [membre du comité de rédaction de la revue acadienne Ancrages] et Marie-Diane Clarke [membre du comité de rédaction de la revue fransaskoise À ciel ouvert], ainsi que la commissaire artistique Anne Brochu Lambert », précise Jeffrey Klassen.

Selon le linguiste, cette discussion conviviale s’est fait l’écho de priorités et inquiétudes partagées par un réseau de personnalités artistiques. « Ces personnes proviennent des régions canadiennes où la langue française a un statut minoritaire, ils doivent donc tous affronter les mêmes enjeux », résume-t-il.

Soutenir les artistes

Un tel partage présente plusieurs bienfaits pour ces derniers : « La pandémie est une période très difficile pour les artistes et cette collaboration a pu leur offrir un apport financier, ainsi qu’une visibilité accrue, souligne le docteur Klassen. En unissant les forces des deux revues, les contributeurs des deux régions ont profité d’une couverture plus large, voire même à l’échelle nationale. »

Cette entente a aussi permis de collectiviser les ressources des deux revues afin d’augmenter les cachets d’auteurs et d’artistes. « On se réjouit d’avoir pu soutenir la création littéraire pendant les pires vagues de la COVID-19 », confie le professeur à l’Université de la Saskatchewan.

Malgré les milliers de kilomètres qui séparent la Saskatchewan de l’Acadie, les équipes ont su travailler ensemble. « Toutes nos réunions se sont tenues au format virtuel, témoigne Jeffrey Klassen. La pandémie nous a appris de nouvelles façons de tisser des liens à travers l’espace. »

Changer les regards

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Le 7e numéro de la revue À ciel ouvert Crédit : Courtoisie

À ceux qui pensent que l’Ouest canadien fait figure de mauvais élève en matière de francisation des arts, Jeffrey Klassenrépond : « Je pense que cette notion est manifestement erronée parce qu’elle ignore toute activité linguistique qui entoure la création artistique, comme les communications et les discussions entre artistes qui se font en français, la critique de cet art, et surtout l’engagement avec les communautés francophones pour lesquelles ces œuvres sont créées. »

Le professeur espère ainsi voir la réputation de l’Ouest francophone changer : « Nous comptons un grand nombre d’artistes prodigieusement doués qui travaillent en Saskatchewan et dans l’Ouest canadien. Nous ne devrions pas douter du talent qui existe chez nous », ponctue-t-il.

En outre, le rapprochement des francophones présente un intérêt tout particulier pour le linguiste : « La diversité linguistique est une aubaine, et entendre à la même table ronde des accents acadiens, fransaskois, français, africains, québécois et autres est une source de joie pour un linguiste comme moi. »

Et d’ajouter : « Nous partageons tous la responsabilité de favoriser cette diversité au sein de nos communautés. De la même manière que nous ne voudrions pas que la langue française soit assimilée par l’anglais en Amérique du Nord, nous devrions éviter une assimilation au sein de notre francophonie nord-américaine. Nous devrions œuvrer à préserver la multiplicité des langues françaises qui y existent », avance l’intellectuel.

La conférence Créations et fictions dans les Prairies a été présentée les 19 et 20 mars 2021 par le Collectif d’études partenariales de la Fransaskoisie (CEPF), l’Université de la Saskatchewan et l’Association francophone pour le savoir de la Saskatchewan (ACFAS). 

La revue À ciel ouvert est produite en collaboration avec la Coopérative des publications fransaskoises (CPF). Le dernier numéro peut être retrouvé sur son site web.