Sécheresses à répétition: le défi à venir pour l’agriculture
Photo : Mélanie Jean (2015)
Alors que les premiers gels commencent à se faire ressentir, la saison des moissons est sur le point de s’achever, mettant fin à une saison agricole affectée par des conditions particulièrement sèches.
Les Prairies canadiennes ont expérimenté l’hiver et le printemps les plus secs depuis 68 ans, entraînant de sérieuses inquiétudes chez les agriculteurs de la Saskatchewan. Plusieurs facteurs sont à l’origine de telles sécheresses : un hiver chaud et peu neigeux, une fonte des neiges précoce et de faibles précipitations printanières.
John Pomeroy est directeur du Centre d’Hydrologie à l’Université de la Saskatchewan à Saskatoon. Depuis plusieurs années, il suit avec son équipe 35 stations d’observation du couvert nival dans les Rocheuses entre Kananaskis et le glacier Athabasca (au sud du parc national de Jasper). Mi-juin, dans le Globe and Mail, Pomeroy affirmait que le couvert de neige dans les montagnes se situait au quart de ce qui est normalement mesuré et avait fondu entre quatre et six semaines plus tôt que d’habitude. Plusieurs rivières comme les South et North Saskatchewan sont alimentées par l’eau de fonte en provenance des montagnes. Or faute de neige suffisante, les Prairies doivent compter sur la pluie pour alimenter les récoltes en eau. Malheureusement, les précipitations ont été exceptionnellement faibles en mai et juin. En Saskatchewan, les conditions se sont améliorées en août, avec des précipitations quasi normales selon Agriculture Canada. Des orages isolés ont également soulagé certaines régions de la province pendant l’été.
L’année 2015 exceptionnellement aride
Dans une entrevue accordée au National Observer, John Pomeroy affirmait que les sécheresses dans l’Ouest canadien ne sont pas une nouveauté, mais que celle de 2015 était exceptionnellement étendue, allant du nord-ouest de l’Ontario au Pacifique et de la frontière mexicaine jusqu’à l’océan Arctique. Même si la variation historique de précipitations demeure la même, une augmentation de la température, causée par les changements climatiques, peut entraîner une augmentation de la fréquence et de la sévérité des épisodes de sécheresse. Une tendance à l’impact dévastateur pour l’économie agricole dans les Prairies. Un manque d’eau peut entraîner d’autres conséquences sur les récoltes. Les plantes affaiblies sont plus vulnérables face aux attaques d’insectes et de maladies. Cet été, de nombreux rapports ont signalé des dommages causés aux cultures par des sauterelles qui semblent prospérer dans des conditions difficiles, pucerons et teignes des choux. De forts vents et de la grêle peuvent également causer d’importants dommages sur des cultures déjà en mauvais état.
À la mi-juillet, on s’attendait à des récoltes mauvaises, voire désastreuses. Mais les pluies de la fin juillet et d’août ont permis à plusieurs cultures de reprendre de la vigueur. En Saskatchewan, les résultats ne sont pas aussi négatifs qu’on le craignait, si on compare avec l’Alberta, province la plus affectée. Les cultures de pois du sud de la province sont parmi les plus touchées, de même que le blé et le canola. Le temps chaud et sec de l’été a également devancé la saison de la récolte, permettant aux fermiers de moissonner plus tôt que d’habitude. Mais les agriculteurs ne sont peut-être pas au bout de leurs peines. Les experts prévoient le passage d’El Niño, un phénomène cyclique dans l’océan Pacifique qui perturbe les conditions météorologiques à l’échelle globale. Les trois prochaines années pourraient être particulièrement chaudes et sèches. Une mauvaise nouvelle de plus pour les fermiers.
Selon Environnement Canada, le Canadien moyen utilise 251 litres d’eau au quotidien, plaçant le pays parmi les plus grands consommateurs d’eau potable au monde. En Californie, des réglementations drastiques d’utilisation ont dues être imposées après quelques années de sécheresse intense.
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Mélanie Jean
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