Le théâtre fransaskois vu par David Granger
David Granger
Photo: Jean-Marie Michaud (2015)
La nouvelle pièce de théâtre de David Granger, Et le reflet de notre lune dansera, sera présentée dès janvier prochain dans la nouvelle saison de La Troupe du Jour (LTDJ). Avant de s’envoler pour la 6e édition de la biennale Zones théâtrales à Ottawa, l’auteur, comédien et metteur en scène fransaskois de 36 ans donne son point de vue sur l’état du théâtre francophone en Saskatchewan.
Pour ses 30 bougies, La Troupe du Jour fait une fois encore appel à la créativité de David Granger. L’ancien élève de l’École supérieure de théâtre de l’Université du Québec à Montréal se dit satisfait d’avoir pu ajouter une œuvre au programme de LTDJ, tout en ne cachant pas sa frustration de ne pas pouvoir créer davantage. « J’aimerais écrire plus, même si c’est un lourd fardeau. 'Et le reflet de notre lune dansera' est sorti tout seul. J’adore avoir la chance de mettre en scène moi-même mon texte. Je suis vraiment fier de pouvoir aller jusqu’au bout. Il faut que je trouve le moyen de quitter Saskatoon plus souvent pour le travail et surtout en théâtre francophone. L’esthétique du jeu théâtral francophone est moins rigide et plus aventureux que chez les anglophones. »
Un théâtre francophone qui comme toujours peine à sortir de l’ombre. Malgré les difficultés, c’est pourtant avec espoir que David Granger regarde le nouveau programme de La Troupe du Jour. « Même si le financement du monde de l’art connaît un temps précaire, LTDJ poursuit son envol. J’aime beaucoup ce qui se produit au niveau des auteurs. La dramaturgie fransaskoise qui émerge est assez phénoménale », explique-t-il. Un dynamisme indispensable tant le contexte est complexe dans la province pour l’art en français. « Il y a un manque de comédiens, de metteurs en scène, de scénographes et d’éclairagistes. On peut difficilement survivre ici. C’est la réalité du milieu », déplore-t-il.
Pour continuer à exercer, le lauréat du Prix national d'excellence RBC 2011 n’a donc d’autre choix que de se tourner vers les troupes anglophones. L’auteur travaille donc beaucoup en scénographie avec les compagnies majoritaires. « Sans ça j’aurais besoin d’un autre métier ! »
Quant à l’avenir? David Granger s’interroge sur la mobilisation de la nouvelle génération. Selon lui, il faut trouver des formules incitatives. « On ne peut pas s’attendre à voir les jeunes développer un amour du théâtre juste comme ça. Le retour du théâtre communautaire à LTDJ devrait aider. La Troupe a quand même besoin de se ressourcer », estime-t-il. C’est d’ailleurs grâce à l’art fransaskois que ses collègues Gilles Poulin-Denis, Jacques Poulin-Denis et Rachel Duperreault ont eu la chance de jouer et d’y prendre goût.
Des exemples qui lui rappellent ses premières armes au sein du théâtre fransaskois, lorsqu’il était dans l’ombre des comédiens, côté technique. « Lors de la production de 'En attendant Godot', j’étais technicien. À regarder ce spectacle, jour après jour, je riais, j’étais touché. Même si à cette époque je n’associais pas vraiment l’importance du texte à ce plaisir, avec le recul, je reconnais que la source première du théâtre est dans le texte. »
La chance lui sourit. L’auteur fransaskois a été contacté par Théâtre Action. Cet organisme de développement du théâtre en Ontario et au Canada français l’invite, à titre de scénographe, à participer à un laboratoire d’analyse et d’exploration de trois jours organisé par le Cercle Molière de Winnipeg, sur un texte de Gilles Poulin-Denis intitulé Dehors. Un texte jusqu’ici jamais produit, qui fait suite à la pièce à succès Rearview. David Granger fera également partie du spectacle De Neptune à aujourd’hui. La production commémore les 400 ans de la présence française en Ontario à travers de courts textes pondus par cinq auteurs invités.
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