Numéro 1 - Printemps 2017

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je me cache

je me cache

je me cache

Louise Dandeneau (Manitoba)

je me cache
du fond de la Rouge
je reste à la surface grise
mouvementée après la fonte
emportant les déchets
jetés là
par des insouciants

je me cache
des plis boueux de la terre
sous les plis mous de ma mère
qui oppressent
me retiennent
m’ancrent dans la détresse

je me cache
de ma terre natale
dont je ne vois pas les racines,
mais à laquelle je m’accroche
faute de mieux
les graines amères semées
d’un champ à l’autre
je me cache
des plaines immenses
mon centre 
nu
mes confins
des traits
minces et fragiles

je me cache
des horizons infinis
qui me poussent à aller
trop loin
vers des terres sauvages

je me cache 
de mes origines métisses
ce sang mêlé
de la Rouge et de l’Assiniboine
mêlé de confusion
de honte


je me cache
de mon franglais
à la recherche
des mots justes
tandis que ceux de ma mère  
passent entre les lames
des grands vents de prairie

je me cache
de l’aridité de mon enfance
de la violence de mes émotions
sous la peur qui enfle
au fur et à mesure
que j’avance
à petits pas
pourtant je reste 
au même endroit

je me cache
de la rue Marion
de la rue Des Meurons
du boulevard Provencher
de l’avenue Taché
ce carré devenu spirale
au cœur
tantôt tendre
tantôt cruel

je me cache
derrière les manquements
de ma mère
de mon père
derrière les gifles les cris les injures
les blessures qui perdurent
le pardon qui vient
si lentement
je me cache
sous ma soif de connaissances
ma soif de reconnaissance
sans savoir comment m’y prendre
mon parcours truffé
de fautes de maladresses de regrets

je me cache 
au bord flou
d’un terrain de jeu
pour vous observer
vos existences entrelacées
au sein d’une communauté
qui n’est pas la mienne
qui ne l’a jamais été

le vent ébouriffe mes cheveux
fouette mon corps
glace mon âme

la rivière me convoque

cache-toi
cache-toi
cache-toi
susurre l’écho
entre deux crues
 

Louise Dandeneau

Entre 2008 et 2018, Louise Dandeneau a publié des nouvelles dans Virages (Ontario) et les Cahiers franco-canadiens de l’Ouest (Manitoba), une nouvelle dans le collectif Sillons – hommage à Gabrielle Roy chez les Éditions du Blé en 2009, et trois micronouvelles dans le collectif Bref! chez les Éditions du Blé en 2017. Son premier recueil, Les quatre commères de la rue des Ormes, a paru chez les Éditions du Blé en 2016. Elle est aussi poète de haïkus. Ses haïkus ont paru dans les collectifs Dans la forêt lointaine en 2019 et Secrets de femmes en 2018, les deux chez les Éditions Pippa (Paris), ainsi que dans le collectif Sur une même écorce en 2014 chez les Éditions David (Ottawa).

Louise Dandeneau est également photographe.

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Printemps 2017

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Mardi le 10 mai ’66. De bonne heure le matin, au Restaurant Lafontaine à Métabetchouan au Lac-Saint-Jean. L’accent du Lac est présent à différents degrés chez les personnages. Il affecte en particulier Monsieur Pit, un sympathique septuagénaire à la retraite. Jeannot Lafontaine, douze ans, est debout derrière le comptoir. Il porte son uniforme d’écolier  sous un tablier. Monsieur Pit est assis à son...

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Cantate pour légumes (Extrait)

Au cœur de ce texte sont quatre êtres qui ont perdu leur voix, la capacité d’exprimer leur volonté et leur angoisse. Ancrés dans leurs fauteuils roulants, Asperge, Gourde, Navet et Asperge rêvent d’évasion. Dans les solos de la cantate, les légumes expriment leurs désires les plus profonds.

Triptyque - Micro nouvelles Triptyque - Micro nouvelles

Au coin de l’avenue Idylwyld et la 23e un bip discontinu se fait entendre à ma gauche. Un clignotement sonore: on peut traverser.  Entre les deux lignes on peut traverser. “Passez, monsieur. Priorité aux piétons.” Oui, on peut traverser. On peut traverser si les autos s’arrêtent.

Entreciel

Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.

La mousse La mousse

Maman, pourquoi c’est mouillé ici? 

C’est la mousse, mon chéri. Fais attention à ne pas glisser.

De la supercherie De la supercherie

Cette réflexion est née d’un constat. La vie ne nous appartient pas. Elle nous a été léguée et nous la rendrons en même temps que notre dernier souffle.

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