Numéro 1 - Printemps 2017

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Premier pas


Premier pas

Mot de présentation du comité d'édition

Nous sommes ravis de vous offrir le premier numéro d’À ciel ouvert : une collection de onze auteurs partageant treize textes.

Après plus d’une douzaine de rencontres, généreusement hébergées par la Troupe du Jour et parrainées par la Coopérative des publications fransaskoises, ce premier numéro offre des textes d’auteur(e)s principalement de la Saskatchewan, avec une heureuse contribution d’un Franco-Manitobain en exil volontaire.

Suivant le mandat de cette revue littéraire, dont la mise en œuvre s’effectue en Saskatchewan, notre main demeurera solidement tendue à nos compatriotes écrivant dans l’amitié du Manitoba, près de la rose sauvage de l’Alberta, et à tous ceux et celles qui ont le cœur ou l’esprit enraciné dans la Prairie.

Ces onze textes numérisés traverseront nos frontières à la vitesse de la lumière. Nous espérons que les lettres, les sons, les images et les rythmes agencés à ciel ouvert vous accompagneront lors de vos migrations littéraires et vous feront voyager sur les ailes de l’imaginaire.

La littérature est restée longtemps l’enfant pauvre de la culture francophone en Saskatchewan. À part les romans du prolifique Jean Féron (1881-1955) et quelques rares textes publiés dans Le Patriote de l’Ouest, ce n’est que vingt-cinq ans ans après la fin de la répression linguistique gouvernementale que s’élevèrent les premières voix d’auteurs francophones de la province. Réflexe de l’opprimé ? Quelles qu’en soient les raisons, les années 80 et 90 marquèrent la fin de l’époque du silence. La création des Éditions Louis Riel en 1984 et du magazine littéraire Ruelle en 1992 déclenchèrent une véritable une explosion littéraire, comme si le monde s’était soudainement mis à l’écoute d’une voix restée en sourdine pendant plus d’un demi-siècle.

D’abord, bien sûr, on raconta les luttes : pour la survie de la langue ou contre les éléments. La lutte des cousins Métis aussi. Puis avec l’arrivée d’immigrants européens, les genres et les sujets se diversifièrent. Les récits ou biographies de pionniers laissèrent la place à la poésie, aux essais, aux romans, aux albums et romans jeunesse. Le français des Prairies se métissa de Québécois, de Franco-Ontariens, de Belges, de Suisses, de Français de l’hexagone. Aujourd’hui, les Éditions de la nouvelle plume et leur équipe de bénévoles se diversifient un peu plus chaque année.

Quand à la lutte, pour la survie de la langue, elle est encore là, anglicisation et médias électroniques obligent. Il manquait aux auteurs d’ici un outil qui permette d’échapper à la pression, d’accéder à un auditoire plus vaste. C’est chose faite avec cette revue en ligne dont l’initiative revient à Sébastien Rock, qui s’est reconnu dans les mots et la généreuse passion de son comité de bénévoles : David Baudemont, Jean-Marie Michaud, Ian Nelson, Jean-Pierre Picard et autres comparses du Cercle des écrivains de la Saskatchewan.

La Prairie est une terre nourricière. Où que vous soyez et quand vous le voudrez, venez vous y rassasier.

Et surtout, n’oubliez jamais, avec Éluard, qu’en cette ère surprenante où on aimerait nous faire croire que les existences peuvent être dissimulées dans l’ombre des murs, la terre demeurera elle-même, malgré notre myopie momentanée, « bleue comme une orange ».

 

-David Baudemont et Sébastien Rock
Pour le comité d’édition d’À ciel ouvert

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Printemps 2017

Un jour de grand vent (extrait) Un jour de grand vent (extrait)

Mardi le 10 mai ’66. De bonne heure le matin, au Restaurant Lafontaine à Métabetchouan au Lac-Saint-Jean. L’accent du Lac est présent à différents degrés chez les personnages. Il affecte en particulier Monsieur Pit, un sympathique septuagénaire à la retraite. Jeannot Lafontaine, douze ans, est debout derrière le comptoir. Il porte son uniforme d’écolier  sous un tablier. Monsieur Pit est assis à son...

La Voie lactée La Voie lactée

Il était une fois,
au fin fond du Far West canadien,
dans une province au nom imprononçable,
une cavalière redoutable.

Le grand barrage

À défaut d'être aimé, Henri était respecté de tous les castors. Sa supériorité ne laissait aucun doute. On n'avait qu'à regarder son barrage pour comprendre qu'il était plus doué que les autres.

Knockout

L’aiguille de glace qui arracha Victor Florkowski à la vie ressemblait à un ivoire de mammouth. Elle était aussi large qu’un pneu, aussi longue que la victime, et se rétrécissait en une pointe cristalline —  à double tranchant — dont la beauté fatale resplendissait sous clair de lune.

Cantate pour légumes (Extrait)

Au cœur de ce texte sont quatre êtres qui ont perdu leur voix, la capacité d’exprimer leur volonté et leur angoisse. Ancrés dans leurs fauteuils roulants, Asperge, Gourde, Navet et Asperge rêvent d’évasion. Dans les solos de la cantate, les légumes expriment leurs désires les plus profonds.

Triptyque - Micro nouvelles Triptyque - Micro nouvelles

Au coin de l’avenue Idylwyld et la 23e un bip discontinu se fait entendre à ma gauche. Un clignotement sonore: on peut traverser.  Entre les deux lignes on peut traverser. “Passez, monsieur. Priorité aux piétons.” Oui, on peut traverser. On peut traverser si les autos s’arrêtent.

Entreciel

Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.

La mousse La mousse

Maman, pourquoi c’est mouillé ici? 

C’est la mousse, mon chéri. Fais attention à ne pas glisser.

De la supercherie De la supercherie

Cette réflexion est née d’un constat. La vie ne nous appartient pas. Elle nous a été léguée et nous la rendrons en même temps que notre dernier souffle.

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