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S'exprimer autrement
Cette chronique, en collaboration avec La Cité universitaire francophone,  offre des textes dont les auteurs ont en commun d’avoir choisi le français comme langue seconde.

Thomas Chevalier : Choisir sa voie

Thomas Chevalier : Choisir sa voie
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Le Conseil culturel fransaskois (CCF) a dévoilé le nom de l’artiste qui représentera la Saskatchewan au tout nouveau programme de formation professionnelle Voies musicales : Thomas Chevalier poursuit ainsi son rêve musical.

L’auteur-compositeur-interprète fransaskois a déjà plusieurs cordes à sa guitare avec trois albums à son actif et une participation remarquée l’an dernier au concours Nouvelle scène pour les artistes de la relève. Une lente ascension qui lui permet de bâtir son répertoire et sa réputation.

« Thomas a été choisi parce qu’il est très engagé dans sa démarche, il a beaucoup travaillé les paroles de ses chansons et sa présence sur scène. C’est une belle carte de visite pour se faire connaître dans ce moment de transition », explique Suzanne Campagne, directrice du CCF.

Ce nouveau programme vise justement à amener les artistes plus loin sur le long chemin de la professionnalisation et à les faire passer à une autre étape de leur carrière. Suzanne Campagne précise que des discussions étaient en cours depuis un certain temps avec la société Chant’Ouest pour davantage outiller les artistes émergents : « On voulait aller plus loin que l’organisation d’un gala par année qui n’est pas vraiment le reflet de l’industrie musicale. D’où l’idée de donner plus de formations, dans plus de secteurs, ainsi que davantage de possibilités de peaufiner leur produit sur scène. »

La voie de la formation

Thomas Chevalier se réjouit de l’accent mis sur l’apprentissage : « J’aime beaucoup les formations, je suis content que ce programme ne soit pas un concours cette année comme avec Nouvelle scène. Même si j’ai adoré mon expérience l’an passé, je veux continuer mon cycle d’apprentissage et me perfectionner. »

Il sera accompagné dans sa démarche par Étienne Fletcher qui a été choisi pour être son mentor et formateur dans le cadre de Voies musicales. « Je connais très bien Étienne, il a beaucoup d’expérience, surtout sur scène. Je m’attends à ce qu’il repère mes faiblesses et qu’on travaille là-dessus », précise l’heureux élu qui ajoute qu’il veut devenir un meilleur chansonnier et travailler ses textes pour qu’ils soient plus complexes et plus clairs.

Un homme atypique

L’artiste fransaskois, qui a une feuille de route déjà bien garnie, se dit « étrange » avec un style bien à lui et qui cherche constamment à se dépasser et à créer un univers unique en son genre. Il passe du métal au folk alternatif en passant par la musique country sans oublier les influences aux accents français : « C’est comme si Brassens et Gainsbourg avaient eu un bébé qui s’était marié à Lenon. Ça, c’est moi ! »

La langue française reste au cœur de la démarche, bien mesurée, du compositeur fransaskois qui est particulièrement fier de son héritage linguistique et culturel. « C’est une décision que j’ai prise de jouer en français. Je le vois comme un privilège. La langue française exprime des émotions et des sentiments que l’anglais ne peut pas. »

Il reconnaît du même souffle qu’il faut faire un « maudit bon show » pour plaire aux anglophones car ils ne comprennent pas les paroles, ce qui représente un défi supplémentaire, mais qui ne semble pas l’effrayer, bien au contraire : « Ma musique joue sur des stations radio aux États-Unis, c’est surprenant ! » Pas si étonnant peut-être quand on sait que le musicien caresse le rêve de devenir le chanteur de « French country music » de l’Ouest canadien.

Pas tous dans le même bateau

Thomas Chevalier est particulièrement reconnaissant de l’appui du CCF qui, selon lui, a été essentiel à sa professionnalisation et dont il a profité pleinement pour développer sa pratique artistique. « Quoi qu’il arrive, je vais continuer à faire de la musique, mais le soutien que j’ai toujours reçu du CCF m’amène plus loin dans mon rêve de vivre, un jour, de ma musique. »

La directrice du CCF admet cependant que ce ne sont pas tous les artistes qui sont logés à la même enseigne et qu’il est important de donner les outils nécessaires afin qu’ils puissent tous effectuer un virage en douceur.

« Tous les artistes ne sont pas à l’aise avec l’inconnu et les réactions peuvent être très différentes. Ici en Saskatchewan, on a vu de très beaux exemples de résilience dans le milieu musical. Je pense par exemple à Étienne Fletcher qui a sorti un album malgré la pandémie, à Mario Lepage qui s’est mieux défini comme entrepreneur artiste. Chez nos auteurs, je vois aussi David Beaudemont qui s’est diversifié en offrant des ateliers d’art thérapie », rapporte Suzanne Campagne.

Un secteur sacrifié

La directrice du CCF déplore que le secteur des arts de la scène ait été le plus durement touché par la pandémie. Selon elle, il faudra des années avant que l’industrie se remette sur les rails. « Il y a eu très peu de discussions au niveau provincial sur la reprise des arts de la scène à court, moyen et long termes. On fait grand cas d’un petit entrepreneur qui ferme ses portes, mais lorsqu’il s’agit d’un artiste, cela semble moins grave. Les arts et la culture sont encore considérés comme une industrie de luxe et de loisirs dont l’importance n’est pas reconnue. Les arts ont tendance à être tenus pour acquis et le public s’attend à ce que ce soit gratuit », regrette-t-elle.

Si Suzanne Campagne dénonce la grande « injustice » dont est parfois victime le secteur artistique, elle reconnaît l’immense capacité des artistes à se réinventer. « Ça prend une énorme capacité pour se renouveler, du courage, de la créativité et une grande ténacité à vouloir rester dans cette industrie où l’avenir est incertain. C’est pour cela que nous mettons en place des programmes comme Voies musicales, pour continuer à appuyer nos artistes, pour qu’ils aient le temps de se ressourcer et de se recentrer sur leurs priorités. »

La roue tourne pour tous, et les artistes, qu’ils soient émergents, en mouvance ou fermement implantés, n’ont pas fini de nous étonner.

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