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Bhoutan - Au pays du Bonheur national brut

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Le roi du Bhoutan

Le roi du Bhoutan

Son père lui cédant le trône en 2006, Jigme Khesar Namgyel Wangchuck – gradué d’Oxford - devient à 28 ans le plus jeune souverain.
Le Royaume du Bhoutan est une monarchie constitutionnelle où le bouddhisme est la religion d’État. De la taille de la Suisse, ce pays de 750 000 habitants est enclavé entre l’Inde et la Chine, au coeur de l’Himalaya. On y a inventé la formule du BNB, le Bonheur national brut. Alors que les conflits économiques, religieux, raciaux, sévissent à tellement d’endroits qu’on a du mal à tenir le compte, j’ai eu envie d’en savoir un peu plus sur ce pays qui rappelle Shangri-la – la vallée mythique nichée dans l’Himalaya du roman Lost Horizons.

L’histoire de ce royaume est unique. Jamais colonisé, longtemps isolationniste, le Bhoutan a vécu pratiquement coupé du reste du monde, sans téléphone, ni routes, ni monnaie, jusque dans les années 60. Le pays du Dragon Tonnerre a construit sa première route en 1961, s’est ouvert au monde dans les années 70, a autorisé la télévision et internet en 1999. C’est la plus jeune des démocraties de la planète, ses premières élections législatives ont eu lieu au printemps 2008.

C’est dans les années 70 que le roi Jigme Singye Wanchuck, après avoir observé ce monde auquel il s’était ouvert, en vint à la conclusion que le bonheur des peuples ne passe pas uniquement par le développement économique et que le développement d’un pays doit avoir comme priorité le bonheur de ses citoyens. Il inventa l’indicateur économique du « Bonheur national brut », préféré au Produit national brut.

Le bonheur : une affaire collective et culturelle

On considère que le bonheur est une expérience individuelle qui est générée collectivement. Pas moins de 33 indicateurs – que nous n’énumèrerons pas- servent à calculer le BNB. Le bien-être spirituel et émotionnel est une priorité. Pas une journée d’école ne commence sans la séance de méditation matinale. (Je parierais que le déficit d’attention est plutôt rare là-bas).

Le programme du BNB est fondé sur 4 piliers : la bonne gouvernance, un développement économique durable, la protection de l’environnement et la préservation de la culture. La prudence avec laquelle le Bhoutan « s’ouvre sur le monde » est due dans une très large mesure à ce dernier point.

Le Bhoutan accueille les touristes depuis 1974. Pour se protéger du tourisme de masse, les autorités ont fixé le quota de touristes à 100 000 par an. Tous les étrangers voyageant au Bhoutan doivent passer par une agence et être en mesure de dépenser 250 dollars par jour. (Comme quoi le bonheur, ce n’est pas gratuit!).

Encore aujourd’hui, la capitale Timphou ne ressemble à nulle autre: pas de buildings, de MacDo, d’annonces publicitaires, et pas un seul feu rouge.

Rien n’est parfait, disait le renard...

Moine bhoutanais et son cellulaire

Moine bhoutanais et son cellulaire

La modernité s'installe au Bhoutan.
Depuis le début des années 90, plus de 100 000 Bhoutanais de l’ethnie lhotsampas, Bhoutanais d’origine népalaise, ont du s’exiler. Persécutés par le roi Wangchuk parce qu’ils ne parlent pas la langue officielle du pays et qu’ils pratiquent l’hindouisme, ils se sont retrouvés dans un camp de réfugiés au Népal ou ont trouvé refuge dans des terres d’accueil, parmi lesquelles le Canada qui en a accueilli plus de 1000.

Difficile de concilier ce roi persécuteur avec celui qui a créé le BNB, le même roi qui, en 2005, annonçait que la monarchie absolue avait fait sont temps et qui, en 2006, abdiquait en faveur de son fils Jigme Khesar Namgyel Wangchuck – gradué d’Oxford et à 28 ans le plus jeune souverain de la planète – et annonçait la tenue d’élections en 2008.

La discrimination continue mais les temps changent. Aujourd’hui, les trois quarts des Bhoutanais sont abonnés à Internet et voient le monde défiler devant eux. Selon Tenzing Lamsang, le rédacteur en chef du Bhutanese, « le Bhoutan est en train de sauter de l’époque féodale à la modernité sans passer par l’âge industriel ». Les jeunes ont tous un téléphone portable et portent plus volontiers le jean que le gho, le vêtement traditionnel orange.

Le BNB tiendra-t-il la route? Selon le premier ministre Tshering Tobgay, l’usage des nouvelles technologies s’inscrit dans le projet du Bhoutan « de prendre le meilleur des traditions, du présent et de l’avenir ». L’appui des autorités aux voitures électriques et la promesse d’une agriculture 100% biologique illustrent ce projet.