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Les ingénieurs du chaos
Mychèle Fortin

Les ingénieurs du chaos

Malgré tous mes efforts, je ne décroche pas. Trump. La montée du populisme. Je ne décroche pas et je ne comprends pas. J’essaie de faire le point. Pas pour juger mais pour comprendre. C’est dans ce but que j’ai voulu lire l’essai de Giuliano da Empoli, Les ingénieurs du chaos. J’ai lu. Ça n’a pas calmé mes craintes, mais j’ai compris.

« Le carnaval, disait Goethe en parcourant les rues de Rome, est une fête que le peuple se donne à lui-même. »  

Aux États-Unis, mais aussi ailleurs, la montée du populisme a pris la forme d’un carnaval dantesque, une danse surréaliste dans laquelle toutes les règles établies sont renversées, où les défauts des leaders deviennent des qualités, où l’incompétence est un gage d’authenticité.

Polémiques, menaces, coups d’éclat sont la preuve qu’ils ne font pas partie des élites corrompues – bien que leurs entourages soient largement composés de richissimes élites plutôt corrompues.

Leur propagande truffée de fake news témoigne de leur liberté d’esprit, les tensions qu'ils produisent dans leur fief et au-delà de leurs frontières sont l'illustration de leur indépendance.

Comment est-ce possible ?

Il faut savoir que derrière tout ça se cache le travail continu d’idéologues, de spin doctors, de scientifiques et d’experts en Big Data, qui sont en train de réinventer les règles du jeu, de créer un climat de peur, d’angoisse, d’alimenter la grogne populaire tout en empêchant la création d’un tissu social à l’intérieur du mouvement. On nourrit la colère de chacun, sans se préoccuper de l’ensemble.

Steve Bannon aux États-Unis, Dominic Cummings au Royaume-Uni, Gianroberto Casaleggio et son fils Davide en Italie, Arthur Finkelstein (1945-2017) en Hongrie et en Israël…

Giuliano da Empoli brosse le portrait de ces ingénieurs du chaos sans lesquels les Trump et autres leaders populistes n’auraient jamais accédé au pouvoir. Pour la plupart inconnus du grand public, ils sont en train de changer non seulement les règles du jeu politique, mais aussi le visage de nos sociétés.

Un autre ingénieur du chaos, Vladislav Sourkov, l’idéologue derrière l’arrivée au pouvoir de Poutine et son conseiller politique jusqu’à sa démission en février 2021, a fait l’objet d’un roman, Le mage du Kremlin (2022).

Dans ce qu’on appelle désormais la politique quantique, les électeurs ne sont plus manipulés comme des troupeaux, mais comme des particules élémentaires.

Les ingénieurs du chaos a été publié en 2019. Dans la postface de la réédition du livre en 2023, da Empoli explique comment la pandémie a accéléré cette politique quantique.

Dans un premier temps, des chefs d’État tels que Trump et Bolsonaro ont ridiculisé les plus hautes sphères médicales et se sont attaqués aux élus qui tentaient de mettre en œuvre des mesures sanitaires.

Mais l’opinion publique n’a pas suivi. Ils ont donc changé leur fusil d’épaule, « au point d’en arriver, dans un court-circuit hallucinant, à comparer les antivax aux Juifs contraints de porter l’étoile de David sous le nazisme ».  

L’auteur démontre également comment le carnaval des ingénieurs du chaos a débordé du web et fait son entrée dans le monde réel avec la prise d’assaut du Capitole en janvier 2021, alors qu’on a pu voir clowns, suprémacistes blancs, paramilitaires, bons pères de famille, joyeusement en train de prendre des selfies.

Deux ans plus tard, au Brésil, ce fut au tour des partisans de Bolsonaro d’envahir le Parlement, la présidence de la République et le siège de la Cour suprême.

Comment résister ?

La lecture de cet essai passionnant, dont j’ai à peine effleuré le contenu ici, ne m’a pas rassurée. Mais elle m’a éclairée.  Je voulais comprendre, je comprends. Je n’en demeure pas moins « accrochée ».

« Détourner le regard du spectacle est presque impossible », a déclaré da Empoli à l’émission La grande librairie la semaine dernière. « Se confronter à la réalité d’aujourd’hui, c’est tomber dans un état de transe. »

Comment échapper à cet état, à cette hypnose « qui est la méthode du nouveau pouvoir pour installer son empire » ? Par la lecture, nous dit l’auteur.

« Face à l’hypnose, la littérature est un interrupteur. Le grain de sable qui empêche la machine d’accomplir son œuvre. »

J’ajouterais : lire un livre papier. S’éloigner de l’écran, ça fait toujours du bien.

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Mychèle FortinGhita Hanane

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